Visiblement agacée, Murielle J., 53 ans, a expliqué avec des grands gestes ne « pas avoir la sensation d’avoir fait quelque chose de mal ». Mais le tribunal de Créteil lui a quand même volé dans les plumes ce mardi en la condamnant pour la destruction de nids d’hirondelles de fenêtre lors de travaux en 2023 sur la façade d’un garage lui appartenant à La Queue-en-Brie (Val-de-Marne).
La quinquagénaire ne connaîtra le quantum de sa peine que le 19 décembre. Mais le parquet a requis 5.000 euros d’amende et la présidente du tribunal lui a ordonné d’installer d’ici là une dizaine de nichoirs artificiels sur sa façade.
Alors pourquoi une telle condamnation ? Tout simplement parce que l’hirondelle de fenêtre est protégée en France.
Une espèce « quasi menacée »
Entre 2001 et 2023, le nombre d’hirondelles de fenêtre a décru de 66 % en Île-de-France, indique Eric Grosso, chargé de mission pour la Ligue de protection des oiseaux (LPO), partie civile dans ce dossier. Cette espèce est par conséquent inscrite comme espèce « quasi menacée » en France sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) depuis 2016.
Et, si un nid est détruit, cela « retarde la couvée : arrivée la fin de l’été, les jeunes ne sont potentiellement pas assez forts pour partir en migration » vers l’Afrique subsaharienne, a résumé à la barre Cécile Grimaldi, responsable environnement à l’Office français de la biodiversité (OFB).
Des avertissements ignorés
L’OFB assure avoir envoyé un courrier à Murielle J. et que ses agents ont pris contact avec elle en 2022. Mais la prévenue a affirmé au tribunal qu’on ne lui avait « rien expliqué ». « Je pensais que [les agents de l’OFB] venaient me casser les pieds », s’est-elle défendue, qualifiant la rencontre d’« agression ».
La propriétaire pense que les hirondelles peuvent avoir été chassées par d’importants travaux de voirie, non loin de sa propriété, ou par le bruit d’une proche route départementale. « Lorsque Mme J. fait ses travaux, ce ne sont plus des nids, c’est effectivement des résidus de terre », a assené son avocat, Me Pierre Darkanian, en demandant la relaxe.
Un nettoyage au karcher
Malheureusement, pour détruire les nids même vides, il faut obtenir une dérogation qui s’accompagne souvent de mesures de compensation. Au lieu de quoi – la prévenue l’a admis dans un procès-verbal – elle a nettoyé au karcher les « ovales » de terre présents sur sa façade. « Tout ça est motivé par pure envie de faire des économies et de ne pas se « prendre la tête » avec les règles habituelles en matière d’urbanisme et d’environnement », estime le ministère public.
La prévenue avait déjà écopé d’une amende par le passé pour avoir effectué des travaux sans permis de construire. Concernant les hirondelles, son cas pourrait s’avérer instructif pour d’autres propriétaires qui ignorent la fragilité de l’espèce.
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