Un classique procès de trafic de stupéfiants. Tel aurait pu être celui qui se tient depuis mardi, et jusqu’à ce vendredi 4 octobre, devant le tribunal de Créteil, dans le Val-de-Marne. Mais parmi les 18 prévenus, trafiquants présumés d’un influent réseau d’Île-de-France, figurent aussi les membres d’une agence digitale occulte, à qui ils avaient confié le volet communication et marketing de leur activité. Son nom ? « Pochette Surprise ». Son job ? Créer des emballages « funs » pour vendre du cannabis.

D’« Haribo c’est beuh la vie » au sympathique girafon breton

Le résultat ? Le slogan d’Haribo travesti en « Haribo c’est beuh la vie ! », Orangina qui devient « Oranginash », les savons « Petit Marseillais » déclinés en « Petit Marocain » et « Petit Hollandais », Nutella grimé en « Nutellhash », Oréo transformé en « Obédo », Granola en « Grosse Moula »… Et un célèbre girafon, apparaissant désormais avec « un biscuit à base de cannabis » dans la gueule !

En découvrant leur petite mascotte ainsi détournée, le sang des responsables des crêpes Whaou ! n’a fait qu’un tour. Le fabriquant de la célèbre crêpe fourrée bretonne fait partie de la quinzaine de parties civiles du procès, aux côtés de géants de l’agroalimentaire (Nestlé…) et du luxe (LVMH). À la barre, l’avocat du groupe morbihannais Goûters Magiques (Le Ster, Armor Délices….; 680 salariés), auquel appartiennent les crêpes Whaou !, a dénoncé l’outrage et l’humiliation pour la marque, habituée à mettre en avant « des produits fabriqués en Bretagne (à Plouédern (29) entre Brest et Landivisiau, et à Locminé (56) au nord de Vannes), avec du lait et des œufs frais des fermes voisines ». « La société se bat pour son image positive depuis des années. Et là, c’est à l’opposé de celle qu’elle veut donner », a fait valoir l’avocat, cité par Le Parisien, mercredi.

Des stupéfiants puissants et très addictifs

« On vend une dédramatisation des stupéfiants, sur le style « joyeux goûter d’anniversaire, avec un côté inoffensif », s’est offusqué un autre avocat.

Dans nos colonnes, nous avions déjà relaté ce recours au packaging, notamment pour les réseaux ubershit, accessibles depuis les réseaux sociaux, pour séduire de nouveaux et jeunes clients. Avec « des produits célébrant les gloires du foot (Ronaldo, etc.), du cinéma (Marvel…), des figures ou références du trafic (El Chapo, série TV Breaking Bad, AK 47…) ou des sucreries (Cola, Kit Kat, Kinder Bueno…) ». Derrière ces emballages colorés et ludiques se cachent le plus souvent des produits à base de cannabis affichant des taux de THC – le composé psychoactif responsable des effets psychotropes tels que l‘euphorie et l’altération de la perception – pouvant osciller jusqu’à 50 %, voire 80 % ! C’est cinq à huit fois plus puissant que le cannabis des années 2000. Et infiniment plus addictif.

Poursuivis pour « imitation d’une marque sans l’autorisation de son propriétaire, contrefaçon portant sur une marchandise dangereuse pour la santé ou la sécurité », les prévenus encourent sept ans de prison et 75 000 euros d’amende. Fin du procès ce vendredi.