Le Canard Enchainé met à jour le système astucieux de financement de l’AMIF ( Association des Maires d’Ile-de-France ).
Quand l’Amif ( Association des Maires d’Île-de-France ) évite les démarches classiques de subventions
Dans le monde associatif, il est courant de consacrer une énergie considérable à la recherche de subventions et à la préparation de dossiers de financement. L’Association des Maires d’Île-de-France (Amif) semble avoir trouvé un modèle financier bien plus efficace, s’évitant ainsi ces démarches fastidieuses. Les récentes révélations du Canard Enchaîné, datées du 7 août 2024, jettent une lumière crue sur les pratiques de l’Amif, en particulier en ce qui concerne le financement de voyages pour les maires et les élus, et les relations avec les entreprises partenaires qui financent leur Salon des Maires.
Le scandale au cœur du Salon des Maires AMIF : Des voyages de luxe déguisés
Alors que la majorité des associations lutte pour obtenir des subventions, l’Amif, organisatrice du Salon des Maires d’Île-de-France, a mis en place un système où les entreprises mécènes, souvent fournisseurs des communes, financent en grande partie des voyages de « travail » pour les élus. Ces voyages, se déroulant dans des destinations prestigieuses telles que le Canada, l’Espagne ou encore la Chine, sont censés allier études et affaires, mais incluent d’autres moments de détente et de tourisme (musées, casinos…).
Selon les informations révélées par le Canard Enchaîné, plusieurs maires de la région Île-de-France, y compris des élus du Val-de-Marne, ont participé à ces excursions dans des conditions « facilitées ». Plus préoccupant encore, certains de ces élus ont fait rembourser ces frais par leurs communes, en plus du financement partiel déjà pris en charge par les entreprises « partenaires ».
Amif Partenaires : Un clone suspect au service des intérêts des maires
Toujours dans cet article du Canard Enchaîné, l’existence d’une structure parallèle à l’Amif, nommée « Amif Partenaires », a été dévoilée. Bien qu’officiellement distincte, cette « association bis » fonctionne comme l’Amif, partage l’adresse de l’AMIF, est présidée par le président de l’Amif… mais ce n’est pas l’AMIF. C’est une structure qui regroupe des entreprises partenaires qui participent aux voyages organisés ainsi qu’à d’autres initiatives au service des élus. Présidée par Stéphane Beaudet, maire d’Évry-Courcouronnes, cette structure a pour particularité d’imposer dans ses statuts un secret. Les entreprises et élus qui approchent les instances de « l’Amif Partenaires » sont d’office astreints à une discrétion totale sur les relations et les activités financées.
Salon des Maires et confiance publique : Une transparence nécessaire
Dans le 94, comme dans le reste de l’Île-de-France, ces révélations ont provoqué des interrogations légitimes sur l’intégrité des maires locaux. Alors que le Salon des Maires se veut une vitrine de la transparence et de la bonne gestion publique, ces révélations du Canard Enchaîné mettent en lumière des dérives inquiétantes. Les citoyens sont en droit de se poser des questions sur l’utilisation des fonds publics pour des activités de loisirs déguisées en missions professionnelles.
Les enseignements à tirer pour le Salon des Maires et l’AMIF
Cette affaire souligne l’importance de la transparence et de l’éthique dans la gestion des affaires publiques, en particulier dans le cadre d’événements tels que le Salon des Maires qui se déroule en Île-de-France à l’initiative de l’AMIF. Si des associations comme la nôtre passent des heures à monter des dossiers de subvention, l’Amif semble avoir opté pour une voie plus contestable. Dommage que ce soient les maires qui en soient les instigateurs, ces mêmes maires qui, d’un autre côté, arbitrent les subventions versées aux associations locales de leur commune.
Canard Enchainé du 7 aout 2024
En octobre prochain, plusieurs dizaines de maires franciliens ont prévu de s’envoler pour un séjour de quelques jours à Tallinn, capitale de l’Estonie. Les élus seront accompagnés par des représentants de la fine fleur des bétonneurs et des fournisseurs des collectivités locales françaises. À l’agenda balte de cette joyeuse troupe de 70 personnes : des rencontres officielles, certes, mais aussi des visites touristiques, quelques pince-fesses et une « soirée festive ». On espère qu’ils auront beau temps…
Ce genre de «voyage d’études » est une spécialité de l’Association des maires d’Ile-de-France (Amif), qui regroupe la quasi-totalité des 1 200 communes de la région. Ces dernières années, Québec et Montréal étaient au programme, mais aussi Copenhague, Madrid, Lisbonne, et auparavant Pékin ou encore Shanghai. Avec, chaque fois, un dosage subtil entre « séances de travail » avec les autorités locales et virées touristiques.
Fournisseurs
philanthropes
La facture de ces excursions est réglée en partie par les élus. Lesquels se la font, le plus souvent, rembourser par leur collectivité locale. Ainsi Jérôme Coumet, le maire (PS) du XIII arrondissement de Paris, a fait régler sa note québécoise de 2 500 euros directement par l’Hôtel de Ville, qui l’a acceptée sans discussion.
Le solde de la douloureuse est financé par 60 entreprises adhérentes d’un club étonnant, baptisé « Amif Partenaires », où se retrouvent SFR, Eiffage, Bouygues, Engie, JCDecaux, Veolia, Transdev, etc. Rien que des purs philanthropes ! Autre curiosité : cette association 1901 est domiciliée à la même adresse que l’Amif et se retrouve présidée par la même personne, en l’occurrence Stéphane Beaudet, le maire (divers-droite et Macron-compatible) d’Evry-Courcouronnes.
Les statuts de l’Amif Partenaires valent le détour. L’association y avoue ingénument que sa mission est d’« informer les élus franciliens sur les innovations en organisant notamment des séminaires, des visites de site ou des voyages d’études ». En clair : promouvoir ses services et son savoir-faire en caressant les maires dans le sens du poil…
Pour ses bonnes œuvres, l’Amif Partenaires dispose officiellement d’un modeste budget annuel de 400 000 euros. Maïs cette somme ne comprend ni les dépenses liées à la participation annuelle de ses membres au salon de l’Amif (une sorte de foire commerciale pour élus locaux franciliens), ni un certain nombre de dépenses de lobbying. Par exemple des dîners (forcément « de travail ») organisés à l’As-
semblée nationale ou dans d’autres lieux de pouvoir, et des tournois de golf annuels qui sont toujours ponctués de déjeuners et de soupers (toujours « de travail »…):
Si l’association sait recevoir, elle n’aime guère les bavards. L’article 7 de ses statuts prévoit que, sous peine de « poursuites judiciaires », Ses anciens membres « ne peuvent communiquer sur leurs liens
avec l’association de quelque manière que ce soit ».Comme si des fournisseurs de marchés publics avaient avoir quelque chose à cacher…
H Liffran